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Réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19


Le décret n°2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19 tel que modifié par le décret n°2020-279 du 19 mars 2020 interdit jusqu’au 31 mars 2020 (a minima) le déplacement de toute personne hors de son domicile.


La situation inédite dans laquelle nous nous trouvons nous amène à nous questionner quant aux conséquences du confinement sur les procédures relatives à l’urbanisme et à l’environnement.


L’impact du covid-19 sur les procédures de participation du public


L’article 7 de la Charte de l’environnement prévoit notamment que toute personne a le droit de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant des conséquences sur l’environnement.


Ce principe se retrouve concrètement dans les procédures de concertation, de débat ou d’enquête publique qui impliquent, de fait, la possibilité de réunions publiques.


Les exceptions permettant de se déplacer ne couvrent pas la possibilité de participer à l’élaboration des décisions publiques. Les français ont donc momentanément perdu la possibilité de faire valoir leurs observations dans le cadre de réunions publiques ou de permanence du commissaire enquêteur.


Par un communiqué du 13 mars 2020 la Présidente de la commission nationale de débat public s’est prononcée sur la situation de la manière suivante :

« La Commission nationale du débat public, à la suite des annonces du Président de la République du jeudi 12 mars 2020, décide que

- En application des consignes nationales, et afin de limiter l’exposition de nos équipes comme de nos interlocuteurs, aucune réunion publique (…) ne sera organisée par la CNDP jusqu’à nouvel ordre,

- Dans la mesure où les débats publics ne sauraient se tenir uniquement sous forme numérique, la CNDP adaptera leurs calendriers afin de permettre ultérieurement l’organisation de réunions publiques en présentiel (…) ».


L’organisation de réunions publiques est donc reportée à chaque niveau.


Seule la procédure de mise à disposition du public par voie dématérialisée peut être organisée sans difficulté (art L. 123-19-1 et suiv. c. env.). Dans l’hypothèse où cette procédure comprendrait une réunion publique, cette dernière devra être reportée.


En revanche, la procédure de concertation (art. L. 121-15 c. env. ; art. L. 103-2 c. urb. ; art. L 300-2 c.urb.) devra être adaptée afin de privilégier la voie électronique. Si cette dématérialisation s’avère difficile, il conviendra alors de prévoir des phases complémentaires ou de reporter son issue.


Il convient toutefois de veiller au respect du parallélisme des formes et des compétences qui implique, sauf exception prévue par un texte qu’une modification de procédure en cours ne soit adoptée que par l’autorité qui a pris la décision initiale.


Quant à l’enquête publique, cette procédure devra nécessairement être aménagée en mettant en place, selon les cas :

- Le report des dates d’ouverture et de clôture par publication d’avis dans la presse (art. R. 123-11 c. env.), lorsque cette hypothèse est encore possible,

- L’interruption de l’enquête sur décision du tribunal administratif s’il y a empêchement du commissaire enquêteur (art. L. 123-4 c. env.),

- La prolongation de la durée de l’enquête pour quinze jours en raison d’un cas de force majeure (art. 123-9 c. env.).


L’impact du covid-19 sur les autorisations d’urbanisme


En premier lieu, le confinement implique que les services instructeurs ne peuvent plus recevoir du public, et donc de fait, ne peuvent plus ni recevoir les dossiers papiers des pétitionnaires, ni les demandes de consultation des tiers sur les projets qui leurs sont voisins.


La dématérialisation n’étant pas étendue à tous les services instructeurs, de nombreuses collectivités seront dans l’impossibilité matérielle de pouvoir instruire les dossiers de demande d’autorisation d’urbanisme déposés avant la fin de la mesure de confinement.


De nombreuses décisions tacites naîtront probablement de cette situation.


Toutefois, les collectivités seront dans la possibilité d’opérer le retrait de ces décisions dans le délai maximal de trois mois à compter de leur délivrance tacite (art. L. 424-5 c. urb.).


En deuxième lieu, l’affichage de l’arrêté de permis de construire ou de la déclaration préalable sur le terrain du projet présente un intérêt fortement affaibli au regard de l’interdiction de se déplacer.


En effet, l’objectif de cet affichage est d’informer les tiers de l’existence du projet autorisé et de leur permettre de consulter le dossier en mairie afin de pouvoir former un recours. La situation de confinement empêche cette information.


Enfin, le confinement pourrait également à avoir des effets quant à l’exécution du permis de construire.


Plusieurs organisations professionnelles du bâtiment ont appelé à une suspension temporaire des chantiers non urgents et à une période de réflexion afin de repenser l’organisation du travail.


Il serait donc envisageable que certains ouvrages soient suspendus ce qui pourrait avoir des effets quant à la validité des autorisations délivrées.


Les solutions proposées par le Gouvernement


Afin de pallier ces difficultés et de soutenir les élus, le Conseil des Ministres a présenté mercredi 18 mars 2020 le projet de loi « d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 ».


A l’issue de la procédure législative d’urgence, la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a été promulguée ce jour.


L’état d’urgence est ainsi déclaré légalement pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020 (article 4).


Ce texte autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans les trois mois suivant la publication du projet de loi, des mesures provisoires afin de répondre à la situation de confinement inédite que connait le pays.


L’article 11 prévoit notamment que le Gouvernement sera habilité à prendre par voie d’ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi :

« 2° Afin de faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, toute mesure :

a) Adaptant les délais et procédures applicables au dépôt et au traitement des déclarations et demandes présentées aux autorités administratives, les délais et les modalités de consultation du public ou de toute instance ou autorité, préalables à la prise d'une décision par une autorité administrative et, le cas échéant, les délais dans lesquels cette décision peut ou doit être prise ou peut naitre ainsi que les délais de réalisation par toute personne de contrôles, travaux et prescriptions de toute nature imposées par les lois et règlements, à moins que ceux-ci ne résultent d'une décision de justice ;

b) Adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d'un droit, fin d'un agrément ou d'une autorisation ou cessation d'une mesure, à l'exception des mesures privatives de liberté et des sanctions. Ces mesures sont rendues applicables à compter du 12 mars 2020 et ne peuvent excéder de plus de trois mois la fin des mesures de police administrative prises par le Gouvernement pour ralentir la propagation de l'épidémie de covid-19 » ;


La lecture de ces dispositions laisse entendre notamment que les délais d’instruction et de recours pourraient être aménagés afin d’éviter une recrudescence d’autorisations tacites ainsi qu’une certaine violation du droit au recours pour les tiers.


Ces dispositions sont applicables à compter du 12 mars 2020 et ne pourront excéder plus de trois mois suivant sa publication, soit le 24 juin 2020.


URBANISME & ENVIRONNEMENT – 24 mars 2020

Isabelle BAUDINAUD, Avocat

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